Sources autour de l’assassinat dans les Vosges en 1597 d’un religieux italien à l’identité incertaine – crime crapuleux perpétré par des mercenaires italiens ou crime commis par des hommes de main manipulés par un tiers ?


Présentation

Qui étaient Giuseppe di Cardona assassiné en 1597 dans les Vosges et l’alférez Domenico X instigateur du crime ?

« A dit, ayant juré sur sa vie les deux genoulx en terre, qu’il crioit mercy à Dieu, à Son Altesse et à justice et qu’il est vray il est participant et complice avec Guillelme à la mort dudit jacobin, nous priant d’effacer tous les articles cy devant pour estre plains de mensonge et qu’il estoit prest de nous dire la vérité... »

Extrait de la deuxième des quatre versions du meurtre par Orazio Semelle dit Horace – Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, B 7320, pc. 2 f°4r.

Cette édition de sources rassemble plusieurs procédures dans le duché de Lorraine à la fin du XVI e siècle. Il s’agit d’un ensemble intéressant sur l’histoire judiciaire et la procédure, sur la violence, sur les militaires, sur les voleurs et la répression de leurs actes1. Mais ces documents posent d’autres problèmes et, pour tout dire, jamais nous n’avons été autant embarrassé par une affaire criminelle qui est pleine de détails troublants et qui, sur le fond, n’a été résolue ni en 1597, ni en 2022. D’où cette publication en forme d’appel à collaboration et le média utilisé, l’internet et les humanités numériques étant le moyen le plus adapté pour atteindre le plus de lecteurs possible2.

Lorsque nous avons trouvé la première procédure en 2013 – une levée de cadavre – nous avons surtout retenu un intéressant débat de compétence entre les justiciers. Mais il y avait des détails troublants. Qui était ce religieux tué dans la montagne ? Qui étaient les trois ou deux meurtriers ? Quelle était l’importance de ce que transportait la victime ? Nous avons ensuite trouvé et transcrit un premier procès fait à Nancy à l’un des assassins, qui éclairait l’identité de l’Italien victime et qui livrait encore plus de détails troublants. Nous avons trouvé plus tard un second procès dans une autre sous-série des Archives. Ce procès est fait à un mercenaire italien capturé dans les Vosges en terres germaniques, réclamé par Nancy et envoyé à Saint-Dié3. Nous avons mis ces procédures en attente, dans l’espoir de trouver celui fait au troisième meurtrier. Mais le troisième semble avoir échappé à la justice. L’hypothèse qu’il a manipulé les autres pour qu’ils commettent le crime, voire pour qu’ils se fassent prendre sans que lui-même ne prenne de risques, s’impose assez vite. Aurons-nous un jour le fin mot de l’histoire ? Une certaine lecture peut y voir un fait divers crapuleux. Une autre lecture peut y voir tout autre chose que nous allons exposer. Or il suffirait pour sortir des spéculations d’identifier les deux protagonistes sur lesquels les procès en disent le moins : la victime Giuseppe di Cardona et l’instigateur du crime l’alférez prénommé Domenico.

Mise en perspective

Le religieux a trouvé la mort sur une route bien particulière et à un moment bien particulier du XVIe siècle.

Un axe militaire et politique

Le religieux assassiné venait des Pays-Bas et soit il avait affaire à Nancy soit il n’a fait que s’y arrêter avant de repartir vers l’Italie. Faute de pouvoir emprunter la mer entre l’Espagne et les Pays-Bas espagnols, c’est le Camino español ou la « rue espagnole » ou « route espagnole » également appelée « route des Flandres » ou « couloir des Flandres » utilisé par le roi d’Espagne Philippe II pour transférer des troupes et tout le nécessaire pendant la guerre de Quatre-vingts Ans4. Cette voie part d’Espagne, rejoint l’Italie, traverse le duché de Milan, passe les Alpes et continue par différents itinéraires, dont l’un par la Savoie, Besanzón et la Franche-Comté (espagnole jusqu’en 1678) puis la Lorraine et le Luxembourg ou Liège pour arriver jusqu’à Bruxelles ; l’autre itinéraire, appelé « le couloir de la Valteline » longe la Suisse et le lac de Constance puis le cours supérieur du Rhin et passe par l’Alsace et Strasbourg ou bien il passe plus à l’Est dans le Saint-Empire.

Ce n’est pas un hasard si le religieux Joseph de Cardone emprunte cet axe. Ce n’est pas non plus étonnant, si l’un des meurtriers en fuite, Guillelm Volphus, tombe entre Lorraine et Alsace sur des troupes au service de l’Empereur qui le retiennent et dont le chef le livre à la justice lorraine.

La Lorraine est une plaque tournante logistique et politique. C’est une puissance moyenne qui s’est développée depuis la fin du XVe siècle et qui dans la seconde moitié du XVIe siècle est intervenue dans les affaires françaises durant les guerres de religion qui ont affaibli le royaume5. La Ligue catholique a constitué un grand danger pour la monarchie française. Des Lorrains y ont participé – notamment les Guise, branche cadette de la Maison de Lorraine. Le duc de Lorraine a soutenu les catholiques intransigeants. Mais le vent a tourné au profit d’Henri IV qui remporte les batailles d’Arques (1589) et Ivry (1590) abjure le protestantisme et se convertit au catholicisme (1593) qui est sacré roi (1594) et reconnu par le pape (1595). Le traité de Saint-Germain-en-Laye entre Henri IV et Charles III de Lorraine promet « bonne, perdurable et asseurée paix entre Sa Majesté et ledit sieur duc, leurs Etats, païs et sujets » (art. 1)6. La Lorraine ne fait plus la guerre mais nos procès de 1597 et d’autres avant et après attestent qu’on y trouve constamment des lames mercenaires, de Lorraine et de diverses nations, qui vont où est la guerre.

Le contexte

1597 est une année importante dans la longue guerre des Flandres entre les Provinces Unies et l’Espagne et dans les guerres de religion en France, tandis que le Saint-Empire qui s’était apaisé depuis la paix d’Augsbourg (1555) bouillonne d’oppositions depuis l’avènement de Rodolphe II en 1576.

Précisément, le traité de Greenwich de mai 1596 est signé entre l’Angleterre et la France contre l’Espagne. Ils sont rejoints en octobre par les Provinces-Unies par le traité complémentaire de La Haye. Maurice de Nassau remporte la bataille de Turnhout (janvier 1597) et s’empare dans l’année de plusieurs villes et places fortes dont Rheinberg et Groenlo, marquant le début des « Dix années de gloire » contre les Espagnols malgré la reprise de Rheinberg par Mendoza en 1598. Au mois de mars de la même année 1597, les Espagnols s’emparent d’Amiens par surprise7. Henri IV, qui a été couronné en 1594, a entrepris depuis 1595 de soumettre ou rallier les Ligueurs et faire la guerre aux Espagnols8. En 1597, la perte d’Amiens menace tout , obligeant Henri IV à accourir pour assiéger la ville puis bloquer l’armée de secours espagnole de l’archiduc Albert d’Autriche. La ville sera reprise en septembre, fermant la route d’invasion vers Paris. Les combats du côté du Dauphiné sont importants aussi en 1597 et s’ils sont arrêtés en 1598, la guerre contre le duc de Savoie reprendra en 1600.

Dans le courant de cette année 1597, la diplomatie pontificale œuvre de tout côté. Résigné ou satisfait après l’abjuration d’Henri de Navarre en 1593, le pape Clément VIII a constaté les progrès militaires et politiques d’Henri IV et il veut le concilier avec Philippe II et retourner les forces chrétiennes vers la Hongrie. L’horizon est la paix de Vervins dont les négociations ont commencé en janvier 1597 et qui sera conclue un an après notre affaire, en mai 1598 – un mois après la signature de l’édit de Nantes9.

Notre petit sujet est lié à cette grande politique et diplomatie, soit a minima sous la forme d’un banditisme greffé sur la circulation des personnes sur l’axe espagnol passant par la Lorraine, soit parce que le religieux n’a pas été éliminé par hasard mais parce qu’il exécutait une certaine mission qu’un alférez a arrêtée sur ordre10. C’est un enjeu de cette publication et de l’appel que nous lançons avec. Mais les sources publiées intéresseront aussi des lecteurs sur des sujets divers, comme la présence des Italiens à Nancy, la vie des soldats mercenaires à travers l’Europe et l’activité judiciaire dans un État qui, en ce domaine, est plus compliqué que ne l’est le royaume de France.

Les sources

Les sources de 1597 sont en trois ensembles. Le premier correspond à la découverte d’un cadavre le 1er mai 1597 dans les Vosges, dans les environs du col du Bonhomme, par des paysans chasseurs11. Le deuxième est le procès fait à un certain Horace Semelle au mois de mai à Nancy par les « maistre eschevin et eschevins » qui sont aussi désignés comme le tribunal du Change, à cause de la rue où ils sont installés. Le troisième est le procès fait à un certain Guillelm Volphus au mois de juin à Saint-Dié.

En premier, le dossier comprend le procès-verbal de la levée de cadavre le 2 mai (pc.1) avec une discussion intéressante entre justiciers pour savoir qui prend l’affaire en charge. Il y a une première information réalisée sur place et le même jour (pc.2). Nous avons placé avec ces deux pièces, une lettre du prévôt de Saint-Dié du 6 mai (pc.3) où il rend compte au duc et se désole de n’avoir pas avancé dans l’enquête, disant que « cela est impossible [...] de pouvoir descouvrir si les deux domesticques y meirent la main » – il n’a donc rien appris sur l’identité des deux qui accompagnaient le religieux et il a supposé un lien de subordination des deux envers le religieux, ce qui est inexact. Il fait une observation très exacte : « d’autant qu’il n’y avoit personne présens lors du meurtre ». Or à Nancy, au même moment, on ne s’embarrasse pas de cette difficulté et on procède déjà contre quelqu’un, à partir de preuves indirectes.

Le prévôt de Saint-Dié est en retard sur les développements de l’affaire car à Nancy a commencé dès le samedi 3 mai 1597 une recherche de personnes. D’où le deuxième ensemble de pièces. Le 4 est arrêté un certain Horace Semelle interrogé à partir du 5 et condamné le 8. Le procès comprend l’« information » (pc.1) où au lieu d’avoir dix « témoins »12 ou 20 et plus, comme dans tout autre procès, est entendue une et une seule personne qui est le jeune serviteur du religieux. Or quand on y réfléchit, il y avait quantité de personnes à interroger à Nancy et tout au long de la route suivie par les protagonistes jusqu’au Bonhomme. Semelle est interrogé par les échevins les 5 et 6 mai (pc.2) et alors que l’acte était terminé par les formules d’usage « Plus avant n’a esté interrogé ; répété, a persisté. » ont été enregistrées des déclarations de Semelle en plus (pc.2 f°8r.) où il dit entre autres qui l’a caché du 3 au 4 mai, ce qui dénonce deux personnes qui auraient dû être auditionnées, mais qui ne l’ont pas été, ce qui est intrigant. Suivent aussitôt les réquisitions du procureur général (pc.2 f°8v.) qui requiert qu’il soit appliqué à la question et interrogé sur plusieurs points. Le deuxième interrogatoire, le 7 mai, commence volontairement et est poursuivi sous la torture (pc.3). À la fin, les échevins disent leur enquête terminée et réclament au procureur ses conclusions définitives. Elles sont du 7 mai et figurent à la suite (pc.3 f°3r.). Cependant, le prévôt de Nancy que l’on n’a pas vu intervenir dans les actes précédents, auditionne le même jour la femme et la belle-mère d’Horace Semelle (pc.4). Faute d’heures, il est impossible de savoir exactement dans quel ordre mettre les pièces datées du même jour – l’interrogatoire de Semelle, l’audition des femmes et les conclusions du procureur – mais il nous semble que si les échevins et le procureur avaient entendu parler d’un certain Francisque Bossé, évoqué par l’épouse d’Horace Semelle, ils l’auraient interrogé dessus, et donc cette audition par le prévôt a dû avoir lieu après l’interrogatoire et peut-être même après les conclusions. À moins que les échevins n’aient rien voulu entendre sur ce Bossé qui est un homme « des gens de la suitte de l’ambassadeur de l’Empereur ». Par ailleurs, l’interrogatoire des femmes est un acte spécial, car elles sont trop proches du prévenu pour être considérées comme d’autres témoins le seraient, dans une information. Il y a ensuite une confrontation entre Horace Semelle et sa belle-mère (pc.4 f°1v.) où il n’est pas dit qui a conduit cet acte. Mais comme il est écrit à la suite de l’audition des femmes il paraît logique que ce soit encore le prévôt de Nancy. Or il est remarquable que le contenu de cette confrontation soit discordant avec celui de l’interrogatoire, et surtout que cela n’ait pas eu d’effet sur la procédure. À la suite des conclusions du procureur du 7 mai figure le jugement des échevins le 8 (pc.3 f°3r.). Puis, figure à la suite et de manière tout à fait extraordinaire un interrogatoire complémentaire d’Horace Semelle le 8 mai (pc.3 f°3r.) donc après le procès fini et la condamnation prononcée. Au début de cet interrogatoire figure une mention troublante, à savoir que « Et depuis nous a esté rapporté le procès verbal de la treuve du corps dudit défunct jacobin et certaines informations faictes à requeste du substitut du sieur procureur général de Lorraine à Saint Diey » ce qui correspond aux pièces n°1 et 2 du premier ensemble. Cela souligne bien la précipitation du procès réalisé à Nancy par les échevins, puisqu’ils n’avaient pas attendu que leurs parviennent ces pièces pourtant évidemment essentielles ! Les échevins réalisent quand même un nouvel interrogatoire de Semelle qui laisse l’affaire sur des contradictions qui ne seront jamais élucidées puisque le déjà condamné a été exécuté aussitôt après.

Le troisième ensemble est le procès fait à Guillelm Volphus. Il est plus simple, sauf pour qui prend les décisions à la fin. Il comprend d’abord deux lettres (pc.1 et 2) concernant la capture de Volphus et sa détention en terre d’Empire et sa livraison à la justice du duc de Lorraine à Saint-Dié, le 3 juin 1597. Nous avons ensuite son interrogatoire par le prévôt de Saint-Dié (pc.3) le 21 juin seulement – ce qui souligne bien la précipitation avec laquelle les choses ont été faites à Nancy – suivi par les conclusions du substitut à Saint-Dié du procureur général le 27 juin (pc.3 f°5v .) et par la sentence du même jour (f°5v.) suivie sur la même page par le procès-verbal de l’exécution le 1er juillet (f°6r.). Le tout est rédigé sur la même liasse, comme pour la plupart des procès lorrains où des messagers portent la pièce d’un endroit à l’autre. Il y a aussi des articles de comptes (pc.4).

Les juridictions concernées

Les deux procès ne sont pas réalisés de la même manière ni au même endroit, mais dans les deux cas la sentence a été rendue par les échevins du Change, ce qui est normal à Nancy mais mérite commentaire pour Saint-Dié.

D’une part les « maistre eschevin et eschevins de Nancy » qui sont aussi désignés comme le tribunal du Change, sont juges dans la prévôté de Nancy13. C’est pourquoi ils font seuls le procès à Horace Semelle.

D’autre part ils ont été imposés par le duc pour être des juges supérieurs en Lorraine14. À ce titre ils reçoivent les procédures commencées dans les diverses juridictions de Lorraine et ils rendent dessus un « avis » sur la suite à donner, mais la sentence appartient à la juridiction qui a commencé et finira le procès. Il y a au cours du XVIe siècle une tendance générale à ce que la justice ducale prenne le pas sur les Assises (la justice entre nobles) puis sur les justices seigneuriales et municipales et de village15. Mais à la fin du siècle il y a encore une grande diversité des situations16.

À Saint-Dié il y a deux juridictions, celle du chapitre et celle du duc, laquelle s’impose au-dessus de l’autre, notamment pour le criminel. C’est entièrement la justice ducale que l’on voit agir ici. On doit se demander si la sentence a été rendue spécialement pour ce cas par les échevins de Nancy ou si c’est l’habitude. On voit dans les archives que la procédure est animée par le procureur attaché à la prévôté et l’information est réalisée par le prévôt ducal et lorsque celui-ci a terminé l’instruction ou « besogné » de la procédure, la liasse est envoyée à Nancy. La procédure est alors terminée, non pas par une instance locale mais par un substitut du procureur établi à Nancy – qui à cette époque est Jean Barrois17 – et par plusieurs parmi les échevins de Nancy, lesquels pour Saint-Dié ne rendent donc pas un avis pour éclairer la sentence mais directement la sentence. C’est exactement ce que nous voyons à la fin du procès fait à Guillelm Volphus (pc.3 f°5v.) et c’est le cas dans toutes les procédures que nous avons regardées dans les archives jusque vers 161018. Il y a forcément un « prononcé de sentence » fait solennellement à Saint-Dié avant d’exécuter un condamné mais il ne figure pas dans les sources, où seule apparaît la décision complète et définitive des échevins de Nancy. Pour Saint-Dié, l’établissement de la supériorité du central sur le local a donc été totale19.

Or il y a dans les 80 kilomètres entre Saint-Dié et Nancy et en 1597 il y a ou il devrait y avoir des échevins à Saint-Dié pour rendre justice. En effet la justice vient d’y être réformée par une ordonnance du 1er juillet 1595 qui aurait dû remplacer les usurpations du Change par une nouvelle situation de droit20. Anciennement la sentence était débattue et prononcée par une grande assemblée des « bourgeois » – les habitants de plein droit, potentiellement tous convoqués. D’où la mise en place à Saint-Dié d’une cour composée d’un maître échevin et deux échevins « à vie » nommés par le pouvoir ducal et dont les gages sont payés par le receveur de Saint-Dié et Raon. Cette réforme « peut être considérée comme l’aboutissement de l’évolution du système judiciaire. Elle institue un tribunal local sur le modèle du Change nancéien [...] Cette justice sera inaugurée le 7 juillet 1596 par un discours du procureur général de Lorraine, Nicolas Remy »21.

La justice réformée en 1595 et instituée en 1596 devrait donc rendre la sentence après les conclusions du procureur et l’avis des échevins de Nancy. Mais il n’y a jamais de sentences proprement déodatiennes dans les procédures conservées. On n’y trouve que le dictum des échevins de Nancy et leur sentence est toujours suivie des quelques lignes qui en confirment l’exécution. On peut alors se demander à quoi servent les échevins créés à Saint-Dié mais nous n’en savons rien, car il est impossible d’observer une institution qui ne laisse aucune trace de son activité et qui semble même n’en avoir aucune. La seule raison d’être de la réforme et création de 1595 aurait-elle été de remplacer la forme ancienne de rendre la justice en remplaçant la grande assemblée des « bourgeois » par des officiers échevins mais sans que ceux-ci soient animés ? Ils ne sont même pas mentionnés pour les amendes22.

La haute justice criminelle est donc exercée pour Saint-Dié, de loin, par les échevins de Nancy23. La procédure contre Guillelm Volphus est tout à fait conforme aux autres procédures déodatiennes.

Une victime, un instigateur et deux hommes de main

L’examen du cadavre établit qu’il y a des blessures de défenses aux mains et même des doigts coupés, 12 coups de lame devant et huit dans le dos, de pointe et de taille, et quatre coups à la tête et nous savons qu’il a d’abord été frappé avec la crosse d’un pistolet ! Le terme « massacré » apparaît tôt dans le premier ensemble d’actes. Les procédures fournissent des informations sur chacun des protagonistes et dessinent pour nous trois figures : Le bon, la brute et le truand. Quant à la victime, ce n’était pas le plus paisible des religieux.

La victime

Le religieux est arrivé on ne sait quand à Nancy, dont il est parti le 29 avril 1597 et il a été tué le 30 dans les environs du Bonhomme et inhumé plutôt vite à La Croix. Son identité religieuse tient à ses vêtements. Dans l’information faite à Nancy il n’est encore qu’« ung quidam jacobin Italien de nation passant par ce pays et trouvé mort » avant que son serviteur ne le nomme. Ce serviteur est Ludovic de Bossé âgé de 17 ans qui se dit né en Italie mais qui se dit aussi « bourguignon » ce qu’il faut comprendre comme franc-comtois.

Il s’agirait donc d’un certain Joseph de Cardone ou Giuseppe Cardona ou di Cardona ou de Cardona selon la langue – mais nous n’avons rien trouvé de pertinent sur ce nom24. Ce religieux aurait été confesseur dans la compagnie de chevau-légers du capitaine Carles Desangle en Franche-Comté, au service du roi d’Espagne Philippe II – « sa Majesté catholique »25. Selon le serviteur, il y a environ deux ans, « monseigneur le cardinal d’Austriche y passa » – là où il se trouvait, alors âgé de 15 ans environ. Ce cardinal est Albert d’Autriche (1559-1621) fils (cinquième fils et neuvième enfant) de Maximilien II d’Autriche ou de Habsbourg (1527-1576) empereur (1564-1576) et de Marie d’Autriche, infante d’Espagne. Albert est né en 1559. Il a été élevé à la cour du roi d’Espagne Philippe II, fait cardinal (1577) sans avoir jamais été prêtre, et vice-roi et grand inquisiteur du Portugal. Puis son frère Ernest étant décédé, Albert a été changé de destinée et affectation. En 1595 Albert est en route vers les Pays-Bas qui sont en pleine révolte avec le soutien de l’Angleterre et de la France. Il a été nommé gouverneur des Pays-Bas, dont il sera plus tard archiduc avec son épouse26. Le futur serviteur suit le capitaine Desangle qui suit Albert aux Pays-Bas et il demeure « dans ladite compagnie l’espace de deux ans » à laquelle Joseph de Cardone serait aussi attaché. Le jeune ne semble pas le servir. C’est seulement lorsque de Cardone prend la route de l’Italie qu’il se serait mis à son service. Tout cela vient du serviteur, lequel n’a pas un rôle tout à fait clair – pourquoi ne suit-il pas son maître vers les Vosges ? – et il disparaît après son audition. On n’en saura pas davantage sur le religieux, sinon qu’il est Italien et peut-être Sicilien ou Espagnol et Calabrais. En effet dans la procédure à Saint-Dié il est dit trois fois que c’est un Espagnol et c’est quand la liasse est amenée à la fin à Nancy, qu’il est de nouveau question d’un Italien.

Il y a une autre manière de voir ce personnage, à savoir à travers les yeux des meurtriers. Tout ce que Horace Semelle et Guillelm Volphus savent du religieux, ils ne l’ont entendu que de l’instigateur du crime et ils n’en ont rien vérifié par eux-mêmes. C’est lui qui leur a exposé et fait miroiter que le religieux serait arrivé d’Amiens où il aurait participé à la prise et au pillage de la ville les 10-11 mars 1597 par les Espagnols27 Comme nous savons que les Français ont très vite bloqué la ville, il se serait donc dégagé du piège, pour arriver à Nancy. Cet instigateur aurait évoqué des richesses et proposé qu’ils accompagnent tous les trois le religieux hors du pays pour le dévaliser en chemin. Il n’y a d’autre preuve du passage de Joseph de Cardone par Amiens et en tout cas, il ne s’avérera pas être cousu d’or comme promis.

Le bon... Un alférez prénommé Domenico dit Dominique

Pour nous Le bon mérite ce titre non parce qu’il est moins criminel, mais parce qu’il est de beaucoup meilleur que les autres. C’est en effet lui l’instigateur du crime, lui peut-être qui en a tiré le plus parti, et il est le seul à s’en être sorti à la fin, quand les deux autres ont été atrocement suppliciés.

C’est un homme-mystère qui est soit le plus barbouze des trois soit le plus malin et le meilleur bandit. En effet, il a fait miroiter aux deux autres une fortune et il leur a exposé un plan qu’ils ont appliqué à la lettre. Mais il n’a pas participé à l’exécution de ce plan, puisqu’après les avoir lancés il s’en est retiré au dernier moment, demeurant à Nancy sans prendre de risques et attendant qu’on lui rapporte le résultat de l’entreprise.

Par son titre et grade il s’agirait d’un officier ou sous-officier au service de l’Espagne, à savoir un alférez ou « alphère » plus couramment francisé en « alfière » ou « alfère » ou porte-enseigne. Mais dans les armées du roi Philippe II les soldats sont de nations diverses : Espagnols ou Italiens, de Franche-Comté ou des Pays-Bas, entre autres nations. Il ne peut même pas être identifié par son nom complet qui n’est donné nulle part dans les deux procédures. C’est l’alphère Dominique ou Dominique dit l’Alphère. On sait qu’il a fait le voyage de Tortona à Nancy en 1596, voyage à l’occasion duquel il a rencontré Guillelme Volphus. C’est aussi un Italien – donc sans doute se prénomme-t-il Domenico. Enfin ce soldat de fortune a dit aux autres qu’il espérait une embauche pour aller faire la guerre en Hongrie28. C’est la « montre » de cette expédition qui lui sert de prétexte pour ne pas aller avec eux dans les Vosges, voler et tuer le religieux29. Dans son propre procès, Guillelme Volphus dépose que l’alphère lui a promis de le faire participer à cet engagement.

L’alphère disparaît tôt et jamais – à notre connaissance – il ne sera retrouvé ni puni, ni vraiment identifié30.

... la brute : Orazio Semelle dit Horace

Horace Semelle31 est La brute car il finit par avouer et il est dénoncé, comme étant le principal assassin du religieux. Il est premier et le plus acharné à lui porter des coups nombreux avec des armes diverses. C’est pourquoi nous supposons qu’il est un ancien soldat.

Horace Semelle a un nom bien lorrain, bien français, mais c’est un Italien de Tortona ce qui est confirmé par Guillelme Volphus dans son procès en juin à Saint-Dié. Selon son propre interrogatoire début mai 1597, Semelle est âgé de 26 ans et il est au service de la même maîtresse depuis l’âge de 14 ans environ. En 1597 il est serviteur de la duchesse de Brunswick employé comme « huissier de chambre ». C’est une fonction de garde des portes dans un édifice, et de service des gens qui par dignité et fonction restent assis, tandis que celui qui se tient « arrestez à l’huis » est prêt à faire ce qu’on lui ordonnera, comme transmettre un message écrit ou un ordre verbal.

Le rapport avec Tortona est expliqué en remontant à Christine de Danemark (1521-1590) nièce de Charles Quint à qui l’on a fait épouser à l’âge de 14 ans le dernier duc Sforza de Milan François II (1495-1535). C’est à cette occasion que Tortona lui a été offert. Lorsque François II Sforza est mort (1535) Charles Quint a annexé le duché de Milan qu’il a ensuite donné à son fils Philippe, le futur Philippe II et Christine a conservé Tortona. Devenue veuve en 1535, elle a épousé en 1541 François Ier (1517-1545) duc de Lorraine et de Bar, avec lequel elle a eu trois enfants : Charles (1543-1608), Renée et Dorothée (1545-1621) dont il est question dans la procédure en tant que duchesse de Brunswick, ayant épousé en 1575 Éric II duc de Brunswick-Calenberg. A la mort de François Ier de Lorraine (1545) Charles étant l’héritier mineur, Christine de Danemark a partagé la régence avec son beau-frère Nicolas de Lorraine, puis les États de Lorraine lui ont permis d’exercer seule la régence. Lorsque le roi de France Henri II est entré en guerre contre Charles Quint, il s’est emparé des Trois-Évêchés en 1552 et il s’est imposé dans la Lorraine ducale dont il a destitué la régente qu’il a remplacée par Nicolas de Lorraine. Christine de Danemark s’est retirée dans sa terre de Blâmont, puis à Bruxelles, puis en Bavière, puis elle est revenue en Lorraine en 1560 quand son fils le duc Charles III l’a rappelée. Enfin, en 1578, elle s’est retirée en Italie à Tortona où elle a fini ses jours (1590). C’est à peu près l’époque, vers 1585, où le jeune italien qui devait se prénommer Orazio est entré à son service ou plutôt à celui de sa fille Dorothée, veuve en 1584 et dont on sait qu’à partir de son veuvage elle a rejoint sa mère à Tortona. Après la mort de Christine de Danemark en 1590, Dorothée de Lorraine hérite de son domaine de Tortona. Les origines d’Orazio Semelle sont donc parfaitement claires.

À la question si pendant son service auprès de la duchesse de Brunswick il a jamais commis un crime, vol ou autre, Horace Semelle répond que non. Peut-être n’a-t-il jamais rien fait contre sa maîtresse mais, comme pour les autres, on peut douter que le vol et assassinat du religieux soit son tout premier crime. L’alfère n’a pas pu s’adresser sans raison à telle et telle personne pour leur proposer de voler et assassiner un homme d’Église.

Horace Semelle est marié à une certaine Catherine que l’on fera témoigner contre lui en même temps que sa belle-mère La Teinturière, laquelle est dite veuve d’un certain Marcolot32. Des trois complices, Semelle est le seul qui est domicilié à Nancy. Après le coup fait, Semelle rentre directement à la maison comme s’il ne craignait rien ! Le duc ordonne vite de chercher à Nancy « les Italiens », peut-être seulement ceux qui auraient approché Joseph de Cardone, et Semelle se fait arrêter, mais aucun autre à notre connaissance. Au final, ce n’est qu’un homme de main, une brute et un idiot.

... et le truand. Guglielmo Volfius ou Volfo dit Guillelm

Guillelm Volphus est celui qui est bien né et qui est devenu Le truand. C’est un petit noble désargenté, natif de Montferrat dans le duché de Mantoue, qui a mal tourné et qui est entré quelques mois dans l’armée où il se plaint de ne pas avoir fait de profit. C’est une lame mercenaire. Il se prétend honorable mais on peut en douter, dès lors que lui aussi a été approché par l’alfère Dominique pour le vol et le meurtre d’un religieux. On imagine mal qu’un acte aussi audacieux puisse être le tout début de sa carrière criminelle. Il est interrogé en italien car il ne sait pas le français.

Selon son propre procès, Guillelme Volphus est un Italien âgé de 22 ans, marié, qui a laissé au pays son épouse et dont le prénom d’origine doit être Guglielmo et le nom pourrait être Volfius ou bien Volfo33. C’est un gentilhomme, à vocation militaire, venu d’Italie avec l’alfère Dominique qu’il a suivi en novembre 1596, dans la suite d’une certaine dame Véronique attachée à Dorothée de Lorraine la duchesse de Brunswick. Guillelm Volphus explique qu’il avait besoin d’apprendre à l’étranger le métier des armes pour, à son retour, jouir dans son pays de certains privilèges de noblesse, sous la condition d’avoir acquis une valeur militaire suffisante. Il dit avoir précédemment servi six ans dans les chevau-légers du duc de Mantoue sous les ordres de son beau-père. À cet âge, et sur six années, il devait s’agir surtout de services auxiliaires. D’où sa recherche de vrais emplois « pour apprendre l’exercice des armées ».

Parvenu en Lorraine avec l’alfère Dominique, Volphus aurait servi on ne sait où un certain capitaine Gauchier ou Vaulthier – les enquêteurs ne vérifient jamais scrupuleusement ce qui leur paraît sans importance par rapport aux seuls faits criminels qui les retiennent – puis, n’y ayant rien gagné34, il serait revenu à Nancy où il aurait pris un logement chez la belle-mère d’Horace Semelle. En 1597 il est prêt à tuer et voler pour l’alphère qui lui fait espérer de l’argent et un engagement pour la Hongrie. C’est le sort des mercenaires : s’en aller des pays où « la guerre ne valoit plus rien »35 et trouver ailleurs de la solde et du butin.

Contrairement à tant de procès faits à des prévenus, où les officiers de justice font tout ce qu’ils peuvent pour connaître tous les crimes commis, quitte à soumettre leur prisonnier à la torture, ils n’ont pas cherché à en savoir davantage. Une fois son seul interrogatoire terminé, le 21 juin, la liasse est envoyée par messager à Nancy où se trouve le substitut du procureur général en charge de Saint-Dié. Le 27, celui-ci requiert la même peine que pour Horace Semelle, en traitant le cas comme une affaire purement crapuleuse. Les échevins de Nancy statuent le même jour. Ils n’ont rien voulu savoir d’autre et ordonnent son exécution.

La trame des faits

Nos lecteurs doivent bien comprendre que la justice de ce temps ne procède qu’à partir des paroles des dépositions pour établir des faits et elle ne statue que sur eux et non sur des motifs. Tout établir et rendre cohérent, n’est pas son problème36. Mais en cherchant à savoir qui a fait quoi, elle peut livrer assez d’indices pour satisfaire notre propre curiosité37.

Avant le meurtre à Nancy et Lunéville

Les trois Italiens auraient comploté à l’instigation de l’alphère Dominique, soit chez La Teinturière la belle-mère d’Horace Semelle, où il habite avec sa femme, soit (ou : et) à la taverne du Petit Saint Nicolas (Volphus). L’alphère aurait appâté les deux autres en leur faisant miroiter « chacun quatre ou cinq cents escus » à voler à un certain religieux et levé leurs scrupules en disant que ce n’était pas un vrai religieux et qu’il ne faudrait pas forcément le tuer.

Le plan est vite arrêté : simuler une rencontre fortuite entre eux et sympathiser entre gens de la même « nation » italienne pour l’accompagner et l’assaillir une fois dans la montagne et le voler. Les prévenus interrogés n’osent pas dire que le meurtre était forcément dans le plan, mais on voit mal comment l’affaire aurait pu aboutir sans tuer le religieux. Selon Horace Semelle, Volphus aurait aussitôt approuvé « l’entreprinse », mais pas lui. Selon Guillelme Volphus, c’est Semelle qui aurait adhéré le premier et lui se serait laissé convaincre après, mais avec des réserves.

Le matin du 29, selon Volphus, l’alphère leur donne les dernières informations soutirées au serviteur du religieux, lequel est déjà parti pour Lunéville. Ils se procurent des chevaux à la Poste, ce qui les obligera à établir des contacts embarrassants à Nancy et à Saint-Dié. Soit l’alphère est avec les deux autres jusqu’à la fin de l’affaire, soit il est allé jusqu’à Lunéville seulement, soit il s’est retiré encore plus tôt, au prétexte d’un engagement militaire pour la Hongrie qui l’oblige à rester à Nancy pour voir un capitaine et participer à une revue. Mais l’alphère excite les deux autres à réaliser leur projet et il fait aussi miroiter à Guillelme Volphus la même embauche militaire que pour lui. Mais selon Horace Semelle, l’alphère est venu avec eux jusqu’au Bonhomme (version du 5 mai). Le lendemain il affirme toujours aux échevins que l’alphère était avec eux au Bonhomme, mais cette fois, au lieu de rejoindre le religieux à Lunéville comme eux, il serait parti seul de Nancy pour « les devancer jusques à ce qu’il soit parvenu à la montagne ». En dernier (le 8 mai) il admet que l’alphère n’y était pas mais il affirme que l’alphère a envoyé quelqu’un à sa place « un jeune homme italien de nation duquel il ne sçait le nom » mais qu’il connaît de vue. Aurait-il confondu le serviteur du religieux avec un envoyé de l’alphère ? Ou tient-il par quelque affirmation que ce soit à maintenir l’alphère totalement impliqué dans le complot ?

Selon les autres sources, il est sûr finalement que l’alphère est resté à Nancy. Mieux : en l’absence d’Horace il a pris logement chez La Teinturière et il s’est montré en ville où « plusieurs gens d’authorité » l’ont vu. Il semble donc que l’alphère se soit construit exprès un alibi pendant qu’il avait envoyé la brute et le truand effectuer le sale travail.

Vers le midi du 29, Horace Semelle et Guillelm Volphus partent pour Lunéville où ils retrouvent le religieux. Ils logent à l’auberge de L’Ourse et ils ferrent leur future victime. Le lendemain matin ils lui proposent de faire route ensemble. À leur départ, ils persuadent le religieux de se décharger de ses armes en s’offrant de lui porter. Selon Horace Semelle, c’est l’œuvre de Volphus et selon Guillelm Volphus c’est Semelle qui a réussi à le désarmer.

Ce n’est dit nulle part dans cette partie des interrogatoires, mais le religieux est d’abord accompagné par son jeune serviteur. Les trois cavaliers vont le semer et il aurait reçu consigne de les suivre à son rythme38. Il les aurait perdus vers Raon-l’Etape et il serait allé un peu plus loin que Saint-Dié avec une journée de retard. Pourquoi étaient-ils si pressés ?

Dans la montagne, ils sont vus sur le grand chemin, d’une part, par les deux chasseurs 1er et 2e témoins ensembles, et d’autre part, par le 5e témoin accompagné d’un autre non auditionné. Ils ont dû être spécialement repérés parce qu’il est tard « sur les six à sept heures du soir» pour se diriger vers le col39. Les témoins n’ont vu que trois cavaliers dont le religieux. S’il y avait un quatrième – l’alphère (1ère version de Semelle) ou l’alphère parti en avant (2e version) ou celui qu’il a envoyé à sa place (3e version) – il chevauchait à part des autres, au point de ne pas être associé à eux. Ce ne sera pas éclairci.

Le meurtre et ses suites dans les environs du Bonhomme

Lorsque l’attaque est déclenchée, selon Horace Semelle elle l’est par l’alphère et Guillelm Volphus, tandis que lui se dit « estant beaucoup arrière » et commandé par les autres. Ils le tuent et le dépouillent. Semelle a peu de part au butin. Cette première version est contestée et d’abord sur le butin, parce que son logis a déjà été perquisitionné. Dans une seconde version, mais toujours le 5 mai, il rapproche son personnage de l’action où il tient le cheval du religieux pendant que les deux autres le tuent. Puis l’alphère est parti seul vers Sainte-Marie-aux-Mines, ce qui induit qu’il aurait disparu par le val de Lièpvre vers Sélestat et le Saint-Empire. Horace Semelle et Guillelme Volphus seraient partis ensemble vers La Croix puis Lunéville, où Volphus lui aurait donné sa part en vêtements, qui ont été retrouvés chez lui.

Lorsque Semelle change son récit et raconte la version où l’alphère les a précédés pour tendre une embuscade, ce sont toujours les deux mêmes qui tuent le religieux et lui qui rattrape le cheval. À la fin, il finit par admettre avoir participé aux coups mais moins que Volphus... dont le récit est différent. En effet, selon le récit par Guillelm Volphus, l’attaque est venue d’Horace Semelle mais il a quand même suivi et participé à la mort du religieux40.

Horace Semelle et Guillelm Volphus détroussent le religieux et ne trouvent pas autant d’argent qu’annoncé par l’alphère. Selon l’interrogatoire de Semelle « ils ne bruslèrent aulcunes lettres [mais] les apporta » à Nancy (dernière version). Il y a d’ailleurs des papiers trouvés à son logis : « plusieurs lettres et missives escriptes en latin, françois et italien » avec aussi un cachet d’argent dont la description trop sommaire ne nous a pas permis d’en tirer quelque chose. Selon le prévôt de Saint-Dié ils ont brûlé des papiers et il faut bien qu’il y ait eu des indices sur place pour qu’il ait écrit ce fait.

Horace Semelle et Guillelm Volphus s’en retournent avec les trois chevaux mais il doit être tard et ils s’arrêtent à La Croix dans une hôtellerie où seule la maîtresse de maison les sert. Dans leur conversation et avec leur attitude, ils sèment probablement le trouble chez l’hôtesse. Le lendemain matin 1er mai, ils vendent le troisième cheval à l’hôte Gabriel Ozelle qui se trouve être aussi le maire de la localité et peut-être lui en rachètent-ils un autre (selon le 1er témoin du 2 mai) mais l’hôte ne le dit pas. Non seulement ils ne sont pas passés inaperçus à l’aller mais ils se sont fait bien remarquer au retour et, en plus, le cheval qu’ils ont vendu si proche de leur méfait, est reconnu à l’écurie par l’un de ceux qui les ont vus passer la veille.

Le retour à Nancy et l’arrestation de Semelle

S’en retournant vers Nancy, avant d’arriver à Saint-Dié ils tombent sur le jeune serviteur du religieux qui s’efforçait toujours de les suivre, auquel ils servent une histoire douteuse. Son maître serait parti avec des Espagnols et Italiens. Guillelm Volphus lui aurait proposé de s’en retourner avec eux et de changer de maître, promettant de le prendre à son service pour aller à la guerre en Hongrie. Ils repassent par Saint-Dié par l’auberge du Sauvage et par la Poste où ils changent de chevaux. Le serviteur se serait entretenu à part avec l’employé de la Poste et ils auraient échangé des soupçons sur le sort du religieux. Ils reprennent la route et sans doute avancent-ils sans se presser, car un messager au moins a dû être envoyé à Nancy, où l’affaire sera connue et la justice actionnée bien avant qu’ils ne parviennent à la ville41.

Au village de Laneuveville-devant-Nancy, au-delà de Saint-Nicolas-de-Port et avant Jarville, alors qu’il reste encore 5 à 6 kilomètres avant Nancy, selon Volphus ils apprennent qu’il ne faut pas y aller, ce qui n’a de sens que si on leur a déjà signifié que ce sont les Italiens qui sont recherchés à Nancy. Horace Semelle poursuit néanmoins sa route jusqu’à Nancy, avec le serviteur du religieux puisque celui-ci dépose, une fois « chez ledit Orace » avoir reconnu en sa possession la dague du religieux et l’avoir questionné dessus. On retrouvera ce serviteur plus tard (le 5 mai) interrogé par les échevins et il ne sera plus jamais question de lui par la suite.

Horace Semelle cache son butin de papier, vêtements et objets en métal précieux. Un homme, « serviteur du comte Philippe » de Salm, au fait de leur entreprise, vient à son logis le menacer de les dénoncer et il réclame beaucoup d’argent. Semelle lui fait donner une bourse par sa femme – qui découvre à ce moment les vêtements – puis il cherche à se cacher et trouve asile dans un certain couvent. Le lendemain il se fait prendre. Il est interrogé le 5 mai puis le 6 par les échevins, puis le 7 sous la torture. Les échevins réclament alors au procureur général ses conclusions définitives, arrêtant précipitamment la procédure. Horace Semelle sera en effet exécuté le 5e jour depuis son arrestation et le 4e depuis son premier interrogatoire. Il n’y a pas plus court que ce procès dans tout le corpus lorrain, alors qu’il s’agissait d’un crime grave (meurtre sur les grands chemins) prémédité (meurtre aggravé) et « atroce » (la victime est un religieux) avec des complicités à éclaircir.

L’errance de Volphus et sa capture

De son côté, Guillelm Volphus couche à Laneuveville. Le lendemain, il envoie un message prétexte à Horace Semelle, sans doute pour avoir des nouvelles (selon Semelle) et il apprend que le duc et sa suite arrivent de ce côté pour se rendre à Saint-Nicolas (selon Volphus). Il se cache du cortège mais il est vu par « un cavalier gentilhomme » qui lui dit que le duc fait chercher par toute la ville de Nancy « les Italiens qui ont tuez ung homme d’Église ». Volphus s’éloigne alors de Nancy et s’arrête dans un village d’où il fait porter un message, cette fois à l’alphère Dominique mais celui-ci a disparu. Volphus se procure des habits différents et se dirige vers Blâmont.

Dans des conditions pas très claires, soit il rejoint des soldats car il est toujours en mal d’embauche, soit il tombe sur des soldats qui le retiennent et il finit détenu par la justice du baron de Bonpart. On ne sait pas exactement où il s’est jeté dans la gueule du loup, ni même quand au mois de mai42. Guillelme Volphus dit être tombé sur les soldats de « M. de Chastel » ou « Chasteau Bréhain »43 qui étaient en Alsace « aux Allemaignes » ou qui s’y rendaient. Puis il a été pris en charge par le « prévost de camp »44. La lettre du 1er juin au baron de Bonpart qui est la même personne que M. de Château-Bréhain, lui demande au nom du duc de remettre son prisonnier à la justice ducale. Ce sont des soldats de la garnison de Benfeld45 qui l’amènent à Saint-Dié le 3 juin comme c’est précisé à la fin dans les comptes. Il aurait pu être conduit à Nancy. Le procès de Guillelme Volphus se déroule au mois de juin, à l’issue duquel il est exécuté sur la roue.

Des procès qui ne sont pas satisfaisants

Horace Semelle est condamné à mourir sur la roue et il est exécuté le 8 mai et Guillelme Volphus est exécuté le 1er juillet. Dans les deux cas nous avons des documents comptables avec des détails comme faire fabriquer « à ung rouyer une neufve roue » renforcée par « deux bande de fer au moieux afin qu’elle ne se fende en brisant les membres ». Travail de professionnels.

Une issue normale...

Sur 142 peines capitales appliquées à des voleurs dans le corpus de Camille Dagot, 116 au moins ont été pendus et 13 ou 17 ont été roués46. C’est une peine plus rare que la corde mais qui correspond à l’acte commis par Horace Semelle et Guillelm Volphus. La peine de la roue est normale pour qui a volé et tué sur les grands et hauts chemins. En droit, c’est la peine des vols et des meurtres aggravés, comme ici tuer une personne de la religion. La corde ne suffit pas car « il doit y avoir cette différence » entre les homicides « que un meurtrier de propos délibéré sera condamné à la roue » alors que « celui qui aura commis un homicide par colère » sera seulement décapité ou pendu selon l’usage des lieux47. Son cas est aussi rémissible.

... mais une drôle de manière d’y parvenir

L’information à Nancy n’a entendu que le serviteur du religieux. Cette déposition n’aboutit à rien de concluant sinon à des soupçons. En effet un témoin satisfaisant pour la justice de ce temps est celui qui jure avoir vu quelque chose. Or le seul témoin auditionné n’a rien pu voir. Il faut aussi une accumulation de dépositions concordantes.

Les échevins ne font rechercher personne d’autre à Nancy, ni à Lunéville, ni plus loin sur la route, ni un certain André48 qui aurait été au courant de l’entreprise à son commencement – alors que le procureur général le 7 mai s’est inquiété de cette personne – ni le serviteur du comte de Salm qui est venu rançonner Horace Semelle à son logis après le coup fait, ni les religieux cordeliers qui ont caché Semelle du 3 au 4. Dans toutes les procédures de la prévôté de Nancy où nous les avons vu travailler, les échevins se sont toujours distingués par le temps long mis à procéder, en se servant de la disponibilité des prisons de Nancy pour laisser mûrir les prévenus et obtenir des aveux satisfaisants, en laissant passer des semaines entre deux interrogatoires. Or avec Horace Semelle ils ont bouclé l’affaire du 5 au 7 mai. Le 8 ne sert qu’à lever un doute sur la belle-mère puis Semelle est exécuté.

Les échevins n’auraient-ils pas dû attendre que Guillelme Volphus ou que l’alphère soit capturé ? N’est-ce pas ce qu’aurait fait n’importe quelle autre juridiction, comme Arches, Bruyères ou Blâmont, dont nous pratiquons les archives depuis des années, où pourtant l’on n’a pas autant de facilités qu’à Nancy pour garder un prisonnier ?

Dans quelque sens que l’on prenne la première procédure, on n’est pas face à une manière de faire habituelle.

Des différents niveaux d’implication de Dorothée de Lorraine

Un crime est un trouble social qu’il faut apaiser rapidement, et d’autant plus que le crime est « atroce ». Le crime du religieux, peut-être, ou peut-être les criminels, et au moins Horace Semelle, a aussi une dimension politique. L’une des explications à cette précipitation pourrait être que les échevins et le procureur général ont voulu liquider l’« huissier de chambre » de la duchesse de Brunswick parce que c’était une vilaine affaire criminelle qui atteignait l’honneur de sa Maison.

Nous savons que Dorothée de Lorraine se trouve à Nancy en 1597 car c’est l’année où elle se remarie avec un noble français, Marc de Rye de La Palud, fils d’une comtesse de Longwy, marquis de Varambon (Ain), comte de la Roche et de Villersexel (Haute-Saône)49. Toute la bibliographie date ce mariage « en 1597 » et nous avons cherché à le préciser. Mais malgré une étude extrêmement précise sur la vie de Dorothée de Lorraine, Émile Duvernoy ne dit rien d’autre que « C’est en 1597 et sans doute dans la seconde moitié de l’année que se fit, nous ne savons où, le mariage de Dorothée » et il donne comme raisons qu’en juin de cette année elle est aux bains de Plombières avec son frère le duc Charles III et avec son neveu François, ce qui lui fait penser que le mariage n’a pu se faire qu’après50.

Y aurait-il un rapport entre l’embarras causé à la duchesse de Brunswick au mois de mai à Nancy par une telle affaire judiciaire, et le voyage aux Eaux de Plombières ? À moins que Dorothée de Lorraine revenue d’Italie, soit allée à Plombières simplement parce que les princes lorrains y avaient leurs habitudes. Dans ce cas les échevins de Nancy auraient utilisé son absence pour faire le ménage avant son retour.

Soit tout s’explique simplement, soit il reste des choses à éclaircir sur les personnages et leurs actions.

Conclusions

Joseph de Cardone est-il un personnage indépendant qui fait ses propres affaires, ce qui est très improbable pour un membre d’un ordre religieux, ou est-il un agent, un émissaire de quelqu’un (ou de plusieurs ?) mais de qui et de quoi et pour quelles affaires ? A-t-il été visé et assassiné pour la fortune qu’il était supposé transporter avec lui ou a-t-il été exécuté à cause de sa mission et détroussé pour des papiers qu’il fallait détruire ou lui prendre ? L’enjeu de cette affaire est-il les « lettres et missives escriptes en ydiomes latin, françois et italien » en partie détruites et en partie récupérées, ou était-ce seulement pour l’argent ? Le religieux a-t-il été tué alors qu’il passait par Nancy, sans y avoir spécialement affaire, ou a-t-il été tué à cause d’une affaire proprement lorraine ?

Second personnage dans notre histoire, l’alphère Dominique est celui dont nous aurions le plus voulu que l’on nous parle. Ce n’est pas le cas. Qui est vraiment cet alférez assez habile pour manipuler les deux autres et obtenir un certain résultat sans se salir les mains et puis disparaître à temps et complètement ? À moins que les deux autres, lors de leurs interrogatoires, ne chargent exprès celui qui des trois, est manquant. Sans, d’ailleurs, en avoir tiré avantage, puisque les deux ont fini très mal sur la roue.

Horace Semelle, est condamné pour « vol, assassinat et destroussement » avec « deux siens complices » en mai 1597 et Guillelm Volphus est condamné en juin pour « vol et assassinat » perpétré « concomitement avec défunct Horace » déjà exécuté. Mais pourquoi le procès à Nancy d’Horace Semelle a-t-il été expédié aussi vite sans avoir éclairci toutes les zones d’ombre ? Y aurait-il une divergence entre les échevins de Nancy et le prévôt ? En effet les échevins ont réalisé l’information le 5 mai et l’interrogatoire et ils ont arrêté la procédure et prononcé le jugement, tandis que le prévôt de son côté a auditionné seul la belle-mère et l’épouse d’Horace Semelle le 7 mai et il lui a confronté sa belle-mère le 8, sans que ce soit articulé avec les actes des échevins. Or cette confrontation a aussi pris le caractère d’un interrogatoire du prévenu par le prévôt. Au final, et sachant qu’il n’est pas absolument garanti que le compte-rendu d’un interrogatoire reflète la réalité mais à coup sûr il reflète ce que les interrogateurs ont voulu entendre et ordonné au greffier de noter, comment se fait-il que les échevins et le prévôt n’ont pas obtenu les mêmes déclarations de la part d’Horace Semelle, sans se donner le temps d’y apporter une solution ? Avec les dernières déclarations, l’implication de l’alphère Dominique dans l’entreprise est restée un problème. Judiciairement, condamner quelqu’un, une fois que les faits ont été établis, est licite – Horace Semelle a bel et bien participé à tuer le religieux. Mais n’aurait-il pas été normal d’attendre pour aller au fond des choses et notamment sur les complicités ? Qu’aurait-on fait de l’alphère s’il avait été finalement pris, alors qu’il ne restait du procès d’Horace Semelle que des aveux disparates, avec seulement des mots prêtés à l’alphère, lequel, absent, n’aurait porté aucun coup au religieux ? Or, sans coup porté, sans participation active à l’assassinat, aurait-il pu être accusé de quelque chose ?

Quels liens y a-t-il entre les complices et Dorothée de Lorraine, duchesse de Brunswick ? La complicité des trois est-elle un effet du voyage de 1596, au cours duquel se sont rencontrés l’alphère et Guillelme Volphus, sur la route entre Tortona et Nancy, avant qu’ils ne rencontrent Horace Semelle à Nancy, parce qu’il est au service de Dorothée dans sa résidence du palais ducal ? Est-ce seulement une situation qui a rapproché trois mauvaises personnes sans que leur maîtresse y soit pour rien ou le service de la duchesse de Brunswick a-t-il quelque chose de plus profond à voir avec cette affaire ? Aurait-il fallu creuser la déclaration d’Horace Semelle quand il dit sur le nommé André, originaire du duché de Brunswick avoir parlé « de ce que l’on disoit de Brunsvich et des affaires que madame la duchesse leur maistresse a en ce quartier là » ? On sait qu’après la mort de son mari en 1584 le duché est passé à Jules de Brunswick-Wolfenbüttel et Dorothée de Lorraine a eu des difficultés sur les possessions qu’elle devait conserver, difficultés accentuées à l’annonce de son remariage et après celui-ci51. Enfin, pourquoi Horace Semelle qui se sait recherché dans Nancy se cache-t-il du côté du palais ducal, où se trouvent les appartements de Dorothée ? Le couvent des cordeliers où il est caché par deux religieux se trouve en effet juste à côté du palais ducal. Quant aux deux moines, la charité chrétienne suffit-elle à expliquer que l’on protège un homme qui a massacré un religieux d’un autre ordre, ou l’ont-ils protégé un temps pour une vraie raison ? Pourquoi n’ont-ils pas été recherchés ?

Le lendemain que l’entreprise a été mise en route sans que l’alphère y participe, que lui veut cet autre Italien nommé Francisque Bossé qui est « de la suite de l’ambassadeur de l’Empereur », qui se présente à son logis et que l’alphère emmène aussitôt ailleurs pour parler ? Une fois Horace Semelle rentré chez lui, que vient faire dans cette situation le serviteur du comte de Salm et Rhingrave ? Comment a-t-il été informé de l’entreprise et cherche-t-il seulement à rançonner Semelle pour son compte ou représente-t-il son maître ? Le tout mis ensemble : tous ces étrangers font-ils leurs propres affaires, seuls et à leur niveau, ou leurs maîtres respectifs ont-ils quelque chose à voir dans leurs « complots » ? Le mot est employé cinq fois dans les sources. Mais s’agit-il d’un complot de bandits ? Et à trois ou davantage ? Les échevins de Nancy envisagent qu’ils aient pu convoiter les biens des gens allant « d’Italie en Flandres et de Flandres en Italie » en passant par la Lorraine, soit à eux trois, soit avec ce capitaine au nom incertain dont l’alphère Dominique et Guillelm Volphus ont été les soldats. Ou s’agit-il d’un complot politique et d’une mission confiée à l’alférez intéressant les Pays-Bas et l’Espagne ou intéressant les Lorrains ?

Si un historien quelque part pouvait reconnaître Giuseppe di Cardona nous aurions sans doute de quoi avancer parmi ces mystères. afollain@unistra.fr

Antoine Follain


 Notes

1. Voir notamment Antoine Follain (dir.), Brutes ou braves gens ? La violence et sa mesure, XVIe-XVIIIe siècle, Strasbourg, PUS, 2015 ; Antoine Follain, « Violence brute et violence judiciaire à l’époque moderne : un paysan massacré et deux pendaisons pour l’exemple dans les Vosges en 1615 », Histoire & Sociétés Rurales n°45, 2016, p. 115-170 ; et Antoine Follain, « La Sorcière de ville et la Sorcière des champs en Lorraine aux XVIe et XVIIe siècles », dans Antoine Follain et Maryse Simon (dir.), La sorcellerie et la ville..., Strasbourg, PUS, 2018, p. 63-148.
2. Nous remercions pour leurs réponses à certaines questions Georges Bischoff, professeur émérite de l’université de Strasbourg ; Guido Braun, professeur à l’université de Haute-Alsace ; Alain Hugon, professeur à l’université de Caen-Normandie ; Thomas Brunner, maître de conférences à Strasbourg ; Antoine Fersing, et Philippe Jéhin, membres associés de notre laboratoire UR3400 ARCHE ; Jonathan Pezzetta, doctorant de l’université de Lorraine, membre du CRULH et ATER à Strasbourg ; Alexandre Ruelle, membre associé du laboratoire AGORA EA 7392, Cergy-Paris université ; ainsi que pour leurs réponses et contacts Stéphane Gal, maître de conférences à Grenoble et Fabrice Micallef, maître de conférences à Nantes et Camille Desenclos maîtresse de conférences à Amiens ; et parmi nos étudiants Nicolas Guibourg et Clémence Vial-Detambel et Ivana Barbagiovanni Bugiacca étudiante Erasmus.
3. Le bailliage de Vosges s’étend sur les Vosges du sud mais Saint-Dié relève du bailliage de Nancy qui s’étend sur le plateau lorrain et aussi sur les Vosges centrales jusqu’aux confins de l’Alsace qui dans les sources de cette époque est toujours nommée « Allemagne ».
4. Voir Geoffrey Parker, L’armée des Flandres et la route espagnole 1567-1659. La logistique de la victoire et de la défaite espagnoles dans les guerres des Pays-Bas, Cambridge, University Press, 2e édition 2004, et pour une mise en perspective : Julien Alérini, La Savoie et le ʺchemin espagnolʺ. Les communautés alpines à l’épreuve de la logistique militaire (1560-1659), thèse de l’université Panthéon-Sorbonne sous la direction de Nicole Lemaître, 2012.
5. Sur la Lorraine dans le jeu européen nous renvoyons à une toute récente et excellente synthèse avec une énorme bibliographie : Alexandre Ruelle, « (Dé)construire un État dans un territoire d’entre-deux. Le Piémont-Savoie et la Lorraine à l’époque moderne », Cahiers Tocqueville des Jeunes Chercheurs, juillet 2021, p. 16-59. Voir aussi Fabrice Micaleff, « Les usages d’une souveraineté contestée. Le duché de Lorraine, le grand-duché de Toscane et les villes de Provence pendant la Ligue (1589-1596) », Cahiers de la Méditerranée n°85, 2013, p. 53-64, parmi d’autres publications.
6. Ce traité n’oublie pas les affaires propres de la duchesse de Brunswick qui est remise en possession de certains comtés et rentes en argent qu’elle avait dans le royaume.
7. Le pape travaillait à rapprocher les rois de France et d’Espagne mais la surprise d’Amiens « fut une gelée qui emporta tout l’espoir que l’on avoit » de faire la paix : Histoire de France et des choses mémorables..., tome premier du règne de Henri IV..., par Pierre Matthieu, à Paris, chez Métayer, 1609, tome 1, p. 28.
8. Henri IV travaille jusqu’en 1598 à contrôler les deux Bourgognes par où passaient les troupes allant de l’Italie aux Flandres. Il reprend la Bourgogne ligueuse et neutralise la comté Franche. Il s’est rallié Charles de Guise, aîné de la branche cadette de la Maison de Lorraine et fils du balafré exécuté en 1588, qu’il emploie pour soumettre Marseille. Il négocie pour la Bretagne avec son gouverneur rebelle, le duc de Mercoeur Philippe-Emmanuel de Lorraine, fils de Nicolas, prince cadet de Lorraine, de Mercoeur faisant sa soumission en janvier 1598. Il fait reprendre par Lesdiguières, gouverneur du Dauphiné, le contrôle de cette province menacée par le duc Charles-Emmanuel de Savoie. En mai 1597, Lesdiguières a aussi pour mission de couper la route à une armée espagnole venant de Milan et destinée à la Picardie : Charles Dufayard, Le connétable de Lesdiguières, Paris, Hachette, 1892, chapitre X, et Stéphane Gal, Lesdiguières, prince des Alpes et connétable de France, Grenoble, PUG, 2007.
9. Analyse d’ensemble du traité de Vervins dans : Claudine Vidal et Frédérique Pilleboue (dir.), La Paix de Vervins, 1598, Laon, Fédération des sociétés d’histoire et d’archéologie de l’Aisne, 1998. Vervins est la dernière grande « médiation réussie » du Saint-Siège : Bernard Barbiche, « Le grand artisan du traité de Vervins : Alexandre de Médicis, cardinal de Florence, légat a latere », p. 65-72. À noter le rôle de Pedro Enríquez de Acevedo, neveu du duc d’Albe, ancien gouverneur des Pays-Bas et opposant radical au futur traité qui intrigua contre, avec la complicité du maréchal de Biron : Yves-Marie Bercé, « Les enjeux de la paix en Italie du Nord : le rôle du comte de Fuentes (1600-1610) », p. 175-182. Charles de Gontaut, duc de Biron, complote aussi avec le duc Charles-Emmanuel de Savoie avant et après Vervins et de nouveau lors de la guerre franco-savoyarde de 1600. Il sera finalement exécuté en 1602 pour trahison.
10. En juillet 2021, sont parus les actes d’un colloque qui s’est tenu à Bayreuth en 2017 : Guido Braun et Susanne Lachenicht (dir.), Spies, Espionage and Secret Diplomacy in the Early Modern Period [Espions, espionnage et diplomatie secrète au début de la période moderne], Stuttgart, Verlag Kohlhammer, 2021. L’ouvrage traite des « premiers espions modernes », de l’espionnage et de la diplomatie secrète comme des éléments qui deviennent centraux dans l’information et la décision politiques. Il montre des processus de professionnalisation. Voir notamment Alain Hugon, « La monarchie catholique espagnole et l’intelligence souterraine : une affaire d’État ? (milieu 16e milieu 17e s.), dont la thèse de 1996 publiée en 2004 portait sur "Honorables ambassadeurs" et "divins espions". Représentation diplomatique et service secret dans les relations hispano-francaises de 1598 a 1635.
11. C’est l’un des principaux cols du massif des Vosges. Situé à plus de 900 mètres, il fait communiquer la vallée lorraine de la Meurthe et la vallée alsacienne de la Weiss, reliant Saint-Dié et Colmar, vers l’Alsace et le Saint-Empire romain germanique. Dans une toute autre procédure en 1625, est évoqué un « maistre des chemins » qui en passant « sur le hault de la montagne entre Plainfain et Le Bonhomme » a surpris des gens et arrêté une bagarre entre eux : Arch. dép. M.-et-M. B 3816. Nous ne savons pas si cet office existait en 1597.
12. Les déposants lors de l’enquête qui constitue l’acte d’« information secrète » peuvent parfaitement n’avoir rien vu et déposer sur des on-dit, des rumeurs, les indices donnés par un tiers, comme ils peuvent aussi être des témoins directs et visuels de quelque chose. D’où leur nombre toujours important, sauf dans certains cas où d’ailleurs la procédure ne nous apparaît jamais comme satisfaisante. Voir une information normale dans Antoine Follain, « Présentation du procès fait à Barbe Morel une guérisseuse des environs de Nancy accusée en 1591 d’être sorcière et abuseresse » et l’édition entière du procès dans Criminocorpus Revue hypermédia de l’histoire de la justice, des crimes et des peines : https://journals.openedition.org/criminocorpus/9644?lang=fr (présentation), https://criminocorpus.org/fr/bibliotheque/doc/4966/ (source)
13. Une étude sur une partie de l’activité du Change a été réalisée dans Jonathan Pezzetta, « Le tribunal des échevins de Nancy (XVIe- début XVIIe). Une étude basée sur son registre des causes de 1591 », mémoire de master de l’université de Loraine sous la direction de Stefano Simiz et Julien Léonard, 2017. Jonathan Pezzetta poursuit en thèse. A noter que les archives propres de ce tribunal ne comprennent que des causes civiles. Son activité criminelle n’apparaît plus que dans les procès de la prévôté de Nancy et il est dispersé dans les « avis » écrits dans les procédures de tout le duché. On trouve aussi des feuilles de sentences criminelles qui sont dites copiées et extraites des registres du Change mais ceux-ci ont été perdus.
14. Le duché de Bar, l’autre composante principale des « terres et pays de l’obéissance » du prince, le duc de Lorraine, a une organisation et des procédures différentes.
15. Sur les progrès de l’État moderne en Lorraine, voir Antoine Fersing, Idoines et suffisants. Les officiers d’État et l’extension des droits du Prince en Lorraine ducale (début du XVIe siècle à 1633), thèse de l’université de Strasbourg sous la direction d’Antoine Follain, 2017.
16. Sur la justice lorraine, voir : Charles-Emmanuel Dumont, Justice criminelle des duchés de Lorraine et de Bar, du Bassigny et des trois évêchés, Nancy, Dard, 1848, et Charles Sadoul, Essai historique sur les institutions judiciaires des duchés de Lorraine et de Bar avant les réformes de Léopold Ier, Paris, Berger-Levrault, 1898. Il n’y a pas de synthèse plus récente. Il faut se méfier des malentendus pour les lecteurs qui ne voient pas toujours bien pour quelle époque s’expriment les auteurs. Or vers 1600, c’est très différent d’après 1660.
17. Jean Barrois est substitut du procureur général de Lorraine à Nancy, en titre d’office, entre 1592 et sa mort en 1616, cf. Antoine Fersing. Il est l’auteur des conclusions dans le procès fait à Guillelm Volphus. Dans d’autres procès dans les archives de la prévôté de Nancy, soit le procureur général Nicolas Remy prend la décision, soit c’est le substitut Barrois qui le fait, sans qu’il semble y avoir quelque raison concernant le crime et le criminel en cause, pour décider si le procureur ou son substitut doit le faire. C’est peut-être seulement une question de disponibilité au moment où tel cas est examiné.
18. Pour les procédures criminelles du chapitre, c’est d’abord une tendance et un abus. « Il y a sentence donnée par le maistre eschevin et eschevins de Nancy » et donc plus rien à dire, répond le prévôt ducal en 1573 à une plainte du chapitre contre un empiètement : Arch. dép. Vosges, G490 pc.8.
19. Au XVIIe siècle quand l’information est réalisée pour le chapitre, la sentence vient aussi du Change. Par exemple pour le procès fait à une voleuse de linges et cierges dans l’église de Saint-Dié en 1604, l’information est faite par le maire du chapitre assisté de plusieurs bourgeois, les conclusions sont du « procureur d’office des sieurs vénérables, doyen et chapitre de Saint Diey » et non par le procureur pour le duc et cet officier du chapitre requiert qu’elle soit fouettée et bannie ; puis il n’y pas de sentence émanant du chapitre car elle est prononcée par les échevins de Nancy et l’exécution de la peine est réalisée par le prévôt ducal : Arch. dép. M.-et-M., B8693.
20. L’ordonnance est dans le Dictionnaire historique des ordonnances et des tribunaux de la Lorraine et du Barrois, par Rogéville, à Nancy, chez Leclerc, 1777, tome II, p. 390-392. Il y est reproché aux « habitans dudit lieu nos subjects et bourgeois en corps de communauté » un fonctionnement « par suffrage et à la pluralité des voix [...] avec tant de confusion et peu d’advis [...] qu’il en réussit une infinité d’inconvéniens et malséances à la justice ». Situation qui n’existait déjà plus.
21. Jean-Claude Diedler, « La justice sur les grands temporels de Lorraine du sud... », dans Antoine Follain (dir.), Les Justices locales..., Rennes, PUR, 2006, p. 131-158. Le discours est dans Arch. dép. Vosges G233 pc.42.
22. Voir Antoine Follain, « Des amendes communes et arbitraires aux lettres de grâce... », dans Antoine Follain (dir.), Brutes ou braves gens ?, op. cit., p. 35-134.
23. L’interrogatoire est fini le 21 mais les conclusions du procureur sont seulement du 27, parce qu’il n’est pas à Saint-Dié. Il signe : « Faict audit Nancy ».
24. La consultation du Dizionario biografico degli Italiani n’a rien donné. Le croisement entre Cardona et Sicile mène à un ecclésiastique espagnol : Enrique de Cardona i Enríquez (1485-1530) de la famille Folch de Cardona, évêque de Barcelone (1505) archevêque de Monreale en Sicile (1512) et cardinal (1527). Les Folch de Cardona étaient l’une des plus importantes familles catalanes, subdivisée en diverses branches. Mais il n’y a aucun indice d’un rapport avec notre Joseph. Le Diccionario biográfico español donne bien d’autres Cardona mais il ne connaît pas le nôtre.
25. Le prénom Carles et non Charles peut faire penser qu’il s’agit encore d’un Italien ou d’un Espagnol.
26. En 1598 au traité de Vervins le roi Philippe II acceptera de se séparer des Pays-Bas, dont il remettra la possession à Albert, épousant sa fille aînée Isabelle, lesquels deviendront les archiducs souverains, sous réserve que si le couple s’éteint sans descendance, les Pays-Bas reviendront à l’Espagne.
27. Les Espagnols commandés par Hernandes Teillo Porto Carrero ont réalisé un audacieux coup de main. Très vite, les Français sur ordre d’Henri IV sont venus bloquer Amiens mais la ville ne sera reprise qu’en septembre.
28. À l’est de l’Europe où la guerre ne cesse de s’arrêter et reprendre, une paix est signée en 1568 entre l’empire ottoman et Maximilien II d’Autriche, qui continue à payer aux Turcs un tribut annuel et qui doit supporter la domination ottomane sur une partie de la Hongrie dont il récupère la couronne en 1570. Le traité est renouvelé en 1575, 1584 et 1590. La guerre reprend en 1593 et va durer jusqu’en 1606. Il y a en plus, en 1597, une révolte paysanne en Autriche.
29. Une « montre » est une revue des troupes. On convoque les soldats ou les miliciens pour vérifier leur disponibilité et inspecter leurs armes et leur matériel. Ou l’on appelle à se présenter des soldats que l’on pourrait engager dans une unité en cours de constitution.
30. Nous remercions Alain Hugon qui a regardé pour nous ses fiches et certaines ressources, comme l’inventaire de la série Estado K (France) des Archives générales de Simancas (royaume de Castille) où l’on trouve mention d’un « Capitán francès Domingo » qui est déplacé de Paris à la cour de l’Empereur (p. 304) mais c’est probablement sans rapport.
31. Parmi les différentes manières de nommer ce personnage, nous avons retenu Semelle comme étant probablement la forme la plus proche de son nom italien d’origine.
32. Il pourrait s’agir encore d’un nom italien francisé, peut-être Marcoloto ou Marco.
33. Il y a beaucoup de variantes dans les actes et même deux fois un Guillaume dans son procès : pc.1 f°1r. et pc.3 f°1r. Nous avons retenu Guillelme parce qu’il est plus proche du prénom italien. Quant à son nom, on lui en fait porter des assez divers, y compris un très germanique Wolff.
34. Guillelm Volphus pense au butin quand il regrette après son temps avec ce capitaine Gaulchier, qu’il « n’a en rien sceu avoir » car « les occasions ne s’y présentoient ».
35. Ce sont les mots de Jacques le Roux dit Le Balafré, soldat français de Provence, employé en Lorraine au début du XVIIe siècle, puis il est sans engagement et projette d’aller en Savoie car « la guerre ne valoit plus rien » en Lorraine : Arch. dép. M.-et-M., B3354, Antoine Follain, « Pocès fait en 1618 à Blamont dans les Vosges à Jacques Le Roux dit Le Balafré, ancien soldat devenu ʺtraîne bastonʺ, voleur et ʺmeurtreurʺ » publié dans Criminocorpus Revue hypermédia de l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Voir : https://journals.openedition.org/criminocorpus/10534 (présentation), https://criminocorpus.org/fr/bibliotheque/doc/4978/ (source). Le Balafré finit sur la roue, pour vol à main armé, meurtre et viol. Son cas est intéressant parce qu’il dénie tout ce qu’on lui reproche, sauf un combat à l’épée à trois contre un, dont il est sorti vainqueur, et une entreprise de séduction qui aurait fini en viol, après quoi il aurait donné de l’argent à la fille. Nous y voyons des actes de soldats, que ce naufragé revendique.
36. Exemple extrême dans Antoine Follain et Rosine Hochuli, « Un procès pour infanticide dans la juridiction de Boulay-Moselle en 1606 », dans Lucien Faggion et Christophe Régina (dir.), La violence : regards croisés sur une réalité plurielle, Paris, CNRS Éditions, 2010, p. 261-284. En effet un procès en 2006 aurait tout fait pour comprendre pourquoi une jeune femme avait tué d’un coup de couteau son bébé exprès en public mais la justice en 1606 n’en avait que faire. Il lui importait seulement d’établir qu’elle l’avait fait.
37. Démonstration dans : Antoine Follain, Le Crime d’Anthoine. Enquête sur la mort d’une jeune femme dans les Vosges au XVIIe siècle, Paris, L’Harmattan, 2017.
38. Il y a plus de 80 kilomètres entre Lunéville et Le Bonhomme mais ils s’arrêtent pour déjeuner à Raon-l’Étape et repartent vers deux ou trois heures. C’est très raisonnable car un cheval peut faire deux longues étapes de suite si on lui accorde un repos suffisant entre les deux. Au rythme de dix kilomètres à l’heure, ils sont dans les temps quand ils sont aperçus dans les environs du Bonhomme. En revanche, vers la fin, leur allure est moins raisonnable...
39. ... en effet il y a plus de 20 kilomètres de chemin de montagne entre La Croix et le col du Bonhomme après lequel le chemin redescend la montagne vers Colmar, le premier village, Lapoutroie, étant à encore six kilomètres après le col.
40. Nous comprenons bien quel intérêt a chacun, à raconter le moins pour soi-même et le pire pour le complice. Mais judiciairement il importait peu que l’un ou l’autre ait porté plus ou moins de coups mortels. Le crime est aussi grave pour l’un que pour l’autre.
41. Un messager pressé ne ménage pas son cheval. Il en change autant de fois que nécessaire d’une Poste à l’autre. Il était donc assez facile de les dépasser.
42. Contrairement à Horace Semelle installé depuis longtemps en Lorraine et marié et domicilié à Nancy et qui connaissait le pays. Guillelme Volphus lorsqu’il veut s’éloigner de Nancy vers Blâmont est obligé de prendre « une guide ». Il est perdu en Lorraine. Ce qui a pu le ramener vers les routes et les cols qu’il connaissait.
43. Le nom n’a pas d’intérêt géographique. Les villages de Bréhain et Château-Bréhain ne sont absolument pas dans la zone parcourue mais complètement au nord : Moselle, ar. Sarrebourg-Château-Salins, c. Delme et depuis 2015 c. Le Saulnois. La seigneurie de Château-Bréhain appartient depuis le XIVe siècle à la famille Bayer de Boppart. C’est l’endroit où étaient les soldats qui compte dans la capture.
44. L’officier militaire en charge de l’ordre et de la justice dans le camp et plus généralement dans une compagnie, un régiment ou une armée.
45. Bas-Rhin, ar. Sélestat-Erstein, ch.-l. c. et depuis 2015 c. Erstein.
46. Camille Dagot, Le voleur face à ses juges. Criminels d’habitude et délinquants d’occasion dans les Voges lorraines des XVIe et XVIIe siècles, thèse de l’université de Strasbourg sous la direction d’Antoine Follain, 2019, p. 552 et p. 565.
47. Nous citons ici la Loi Caroline, art. 137, qui n’est pas un code appliqué en Lorraine mais qui reflète parfaitement l’esprit et les pratiques de la justice lorraine, laquelle n’a jamais eu de code Voir Antoine Follain, Le Crime d’Anthoine, op. cit., p. 117-132.
48. Cet André apparaît dans le procès fait à Horace Semelle. Ce n’est pas un Italien mais un Allemand originaire du duché de Brunswick. Ce sont les échevins de Nancy qui le soumettent à Semelle : « Si un nommé André demeurant audit Lunéville, natif de Brunsvich, estoit de leur complot et entreprinse et s’il participa au butin dudit feu jacobin ? ». Semelle répond non mais ils insistent...
49. Un mari dont elle sera veuve dès 1598.
50. La notice de M. Clesse sur Dorothée de Lorraine, dans les Mémoires de l’Académie de Stanislas en 1873, est très sommaire et ne connaît pas le remariage, mais déjà au XVIIIe siècle dom Calmet ne savait rien du second mariage. La seconde notice biographique semble en revanche avoir tout vu sur elle : Emile Duvernoy, « Dorothée de Lorraine », Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1936, p. 38-57. Sur Plombières, la lettre en tête du procès fait à Guillelm Volphus confirme que le duc est « aux bains de Plombières ».
51. Emile Duvernoy, « Dorothée de Lorraine », op. cit., p. 45-48 sur le remariage.

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Antoine Follain et alii (éd.), « Qui étaient Giuseppe di Cardona assassiné en 1597 dans les Vosges et l’alférez Domenico X instigateur du crime ? », dans Sources autour de l’assassinat dans les Vosges en 1597 d’un religieux italien à l’identité incertaine – crime crapuleux perpétré par des mercenaires italiens ou crime commis par des hommes de main manipulés par un tiers ? (Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, B 7319, B 7320 et B 8680), ARCHE UR3400 (Université de Strasbourg) (« TJEM. Textes judiciaires de l'époque Moderne »), 2022, en ligne : <http://num-arche.unistra.fr/tjem/cardona.xml/qui etaient giuseppe di cardona assassine en 1597 dans les vosges et l’alferez domenico x instigateur du crime ?>. DOI de l'édition complète : <https://doi.org/10.34931/7k4k-ma30> (consulté le 19-04-2024).